Ça y est ! Vous avez écouté plusieurs fois l’instrument avec votre enfant, pu le lui faire essayer lors des portes ouvertes ou d’un cours d’essai, discuté avec un ou une professeure et vous avez décidé de l’inscrire à un cours pour commencer son apprentissage. L’étape du choix passée, vous vous retrouvez peut-être avec plusieurs questionnements : comment aider son enfant à bien démarrer avec son instrument ? Combien de temps faut-il lui consacrer et à quelle fréquence ? Comment faire pour que votre musicien en herbe reste motivé une fois la phase des débuts amorcée ? Dans cet article, nous vous donnons 10 conseils, appuyés par nos professeures de violon et de piano à l’EML, Marie Heck et Katja Gafner.
Avoir son instrument entre les mains est un véritable plaisir et votre enfant sera ravi de le saisir dès que possible. Mais avec le temps, il est possible que vous deviez parfois lui rappeler qu’il doit le travailler. Pour désamorcer d’éventuelles frictions, une stratégie qui pourra s’avérer gagnante sur le long cours est de définir ensemble, en amont, les jours de la semaine et les moments qui seront consacrés à la pratique. N’hésitez pas à les noter dans votre agenda ou celui de l’enfant, ou à utiliser un tableau avec des couleurs pour fixer cet engagement pris ensemble. Bientôt, le travail de l’instrument deviendra une routine que ni lui ni vous ne penserez à remettre en question, et qui trouvera sa place naturellement dans votre emploi du temps. Ainsi, en toute bienveillance, et en lui rappelant les bénéfices à la clé, n’hésitez pas aussi à être ferme. « Cela ne nous viendrait pas à l’idée, en tant que parent, de dire à l’enfant : « Ce soir, tu n’es pas obligé de te laver les dents ». Pour la musique, c’est la même chose ! C’est comme une hygiène, cela doit devenir régulier » rappelle Marie Heck, professeure de violon.
Prévoir de bonnes conditions pour pratiquer l’instrument au calme est essentiel selon Katja Gafner, professeure de piano, à qui les parents rapportent souvent des problèmes de concentration chez leur enfant. Ainsi, au lieu de la cuisine ou du couloir, privilégiez la chambre. Et s’il la partage avec un frère ou une sœur, proposez qu’il puisse avoir cette pièce uniquement pour lui, le temps de la répétition. Si l’instrument se trouve dans un lieu de vie commun (le piano dans le salon, par exemple), veillez à ce que la télévision soit éteinte et que votre enfant puisse bénéficier d’un environnement calme. Un autre aspect essentiel, selon Marie Heck, est d’avoir le bon matériel. Un instrument adapté évidemment, mais pas seulement. « Par exemple, pour le violon, c’est selon moi important d’avoir un lutrin à la maison, et que l’enfant ait avec lui ses cahiers », relève-t-elle. N’hésitez pas à vous renseigner auprès du professeur qui pourra vous conseiller un mobilier particulier (chaise, fauteuil, lutrin, etc.).
Une interrogation fréquente chez les parents est celle de la durée et de la fréquence qu’il faut consacrer à l’instrument de musique, à côté du cours. Plusieurs minutes chaque jour ou une longue période une fois dans la semaine ? Dans tous les cas, visez un objectif réaliste, tenable sur le long terme. Votre enfant a également des devoirs scolaires, d’autres activités et il a besoin de moments de repos et de jeux. Selon Marie Heck et Katja Gafner, la fréquence idéale serait quatre à cinq fois par semaine, mais pour des durées relativement courtes. « Au tout début, lorsque l’enfant commence, 4 à 10 minutes suffisent » explique Katja Gafner. « Si on sent qu’il peut faire plus, pourquoi pas ! Mais il faut adapter en fonction de l’âge. Avec un petit de quatre ans, il vaut mieux faire seulement 4 minutes, s’il a du plaisir pendant celles-ci. L’essentiel étant d’instaurer une régularité ». Ces durées peuvent sembler courtes, mais elles suffisent en fait à ne pas perdre les acquis, notamment au niveau physique ; pensons à l’agilité et à la flexibilité des doigts qui se développent, à certaines postures ou aux capacités pulmonaires. Petit à petit, la concentration de l’enfant augmentant, la durée minimale de la pratique évoluera également. Et nul doute qu’en progressant et en prenant du plaisir, votre enfant souhaitera de lui-même étendre le temps de pratique de son instrument !
Vous souhaitez que la musique reste un plaisir pour votre enfant, et c’est bien normal. Entre l’école, les devoirs et les évaluations, il a déjà passablement de moments dans la semaine où il est encouragé à donner le meilleur de lui-même. Vous ne souhaitez donc pas le démotiver en lui imposant de travailler son instrument, au risque, pensez-vous, de le dégoûter… Seulement, contrairement à ce que l’on pourrait croire, à long terme, c’est plutôt l’absence de réel investissement qui pourrait constituer une source de démotivation. « Certains parents me disent : « Ma fille pratique seulement pour le plaisir, alors elle n’a pas trop travaillé ». Mais le risque est que l’enfant aura l’impression de stagner ». Selon Marie Heck, pour que l’enfant soit motivé, il faut que des choses se construisent. Même si chacun suit un rythme différent, une évolution est indispensable. Les mécanismes et les gestes requis pour la pratique de l’instrument s’obtiennent par la répétition. Et le progrès qui en résulte est gage de plaisir pour le musicien.
Certaines pièces font partie du répertoire incontournable d’un instrument et votre enfant sera amené à en découvrir beaucoup durant son parcours musical. Cette variété constitue une richesse et un bagage culturel qu’il conservera tout au long de sa vie. Dans la pratique, il y aura des morceaux qui lui plairont plus que d’autres. Il trouvera également beaucoup de plaisir et de motivation à jouer des morceaux qu’il a pu entendre dans un film, dans la musique de variété, pop-rock ou ailleurs. Les professeur·e·s restent généralement ouvert·e·s à faire travailler ce qui plaît à leur élève et à entrer dans son univers. Que votre enfant n’hésite pas à venir avec des idées et des envies vers son enseignant·e ! « J’avais un élève qui jouait beaucoup aux jeux vidéo, alors je lui ai demandé d’amener son jeu, et je lui ai écrit ce que j’ai entendu. A l’audition, tous ceux qui connaissaient ce jeu voulaient jouer cette musique ! » explique Katja Gafner.
Que ce soit au travers de projets proposés par le/la professeur·e d’instrument ou en prenant part à un cours à option de l’EML, jouer de son instrument en groupe est généralement source de motivation ! « Même pour les débutants, c’est important de participer à des projets collectifs » relève Marie Heck. « Le creux de janvier est souvent une période un peu plus difficile. Alors j’organise une audition collective pour rebooster les élèves. Pour certains, jouer avec les amis, partager ensemble, c’est vraiment LA source de motivation principale ». Les cours collectifs sont pensés dans cet esprit : permettre à l’enfant de rencontrer d’autres musiciens en herbe et partager la musique avec eux. Les professeur·e·s cherchent également à créer cet esprit de classe, en allant par exemple manger avec tous les élèves après l’audition. « Le fait de jouer ensemble permet de progresser aussi car l’enfant n’a pas envie d’être à la traîne par rapport aux autres. Ça le pousse à répéter, et dans un autre lieu généralement que chez lui ou la salle de classe. ». Cela lui donne également l’occasion de côtoyer des camarades plus avancés avec leur instrument, de potentiels modèles, sources de motivation.
Le lien qu’entretiennent le parent et le/la professeur·e est également important pour favoriser l’apprentissage de l’instrument. Les informations que vous communiquerez pourront aider l’enseignant·e à adapter son cours selon ce qui se passe dans la vie de l’enfant, et de manière générale à comprendre sa motivation. « Il faut discuter avec le/la professeur·e, l’avertir d’informations qui auront un impact sur l’enseignement » explique Marie Heck. « Cela peut être des problèmes à la maison, à l’école ou simplement informer que votre enfant n’aime pas certains morceaux ». S’il est démotivé et souhaite arrêter les cours, n’hésitez pas à en parler ouvertement avec son enseignant·e, et n’attendez pas le dernier moment ! Il pourra proposer de travailler des morceaux différents ou adapter les leçons.
Les auditions et les spectacles sont quasiment incontournables dans la vie des jeunes musiciens. Petit à petit, l’enfant apprendra à gérer son trac, ce qui lui sera utile dans bien d’autres moments de sa vie ! En vue de ces différentes échéances, il sera encadré par le/la professeur·e qui le préparera au mieux pour traverser ces étapes. Ainsi, Katja Gafner propose à ses nouveaux élèves de venir simplement écouter la première audition, puis de participer à la deuxième, mais en jouant à quatre mains au piano avec elle. « Les enfants disent qu’ils ont quand même un peu peur. Mais je leur explique que c’est normal, qu’ils ont le droit de se tromper, qu’ils n’ont pas besoin de jouer parfaitement. ». Pour apprendre à gérer le trac et conserver le plaisir de jouer en public, les professeur·e·s peuvent aussi proposer des exercices de respiration et de relaxation.
Quant aux examens, ils font également partie du cursus et permettent de valider les notions acquises. « Pour moi, l’examen représente ce qu’on a validé comme points techniques à un instant T. On vérifie si le premier étage de la maison est assez solide pour construire le deuxième » explique Marie Heck qui prend le temps de bien communiquer avec les parents pour dédramatiser les choses.
Bien qu’à l’EML il ne soit pas obligatoire de suivre des cours de solfège, celui-ci est un complément indispensable pour qui choisit d’apprendre un instrument. « Si on ne fait pas de solfège, on est complètement limité » déplore Katja Gafner. Pour Marie Heck aussi, le solfège est essentiel et interdépendant de la pratique instrumentale. Sans compter que les méthodes d’enseignement de ces cours, qui ont parfois mauvaise presse, ont considérablement évolué. Les professeur·e·s cherchent à proposer la matière de manière ludique et interactive. Il est également possible de choisir la méthode qui convient le mieux à la personnalité de l’enfant entre le langage musical ou la rythmique-solfège. Ces cours sont également l’occasion de rencontrer d’autres musiciens et de se faire des amis. « Certains élèves ont participé au Concours Suisse de Musique pour la Jeunesse avec d’autres jeunes qu’ils ont connus au solfège ! » raconte Katja Gafner.
L’EML propose de nombreux cours d’apprentissage du solfège, suivant deux méthodes différentes (langage musical ou rythmique-solfège), à des niveaux adaptés à l’âge et aux connaissances préalables de l’enfant.
Votre enfant a eu une semaine chargée en devoirs ou en évaluations à l’école, et n’a pas eu le temps de pratiquer ? Ne vous mettez pas la pression. « Cela peut arriver à chacun d’avoir des semaines chargées, et si cela arrive une fois, ce n’est pas grave. En revanche, il ne faut pas penser que cela ne sert à rien de venir au cours, au contraire. » remarque Katja Gafner. L’idée étant de reprendre les bonnes habitudes les semaines suivantes. Gardez à l’esprit que l’apprentissage d’un instrument suppose un travail au long cours. La professeure de piano donne du travail à ses élèves pendant les vacances, mais ne s’attend pas forcément à ce qu’ils l’effectuent : « Je donne, mais je comprends s’ils n’ont rien fait. C’est sain aussi de décrocher un peu pendant les vacances ! ».
Apprendre à jouer d’un instrument apporte beaucoup de satisfaction ! Mettre en place de bonnes habitudes dès le début rendra la pratique de la musique agréable et naturelle dans le quotidien de votre enfant… et le vôtre ! Mais il est parfois normal de connaître des périodes de « creux » : encouragez votre enfant à persévérer, parlez-en à son/sa professeur·e et valorisez sa participation à des projets collectifs. Chacun progresse à son rythme en musique, mais l’évolution avec son instrument est toujours source de plaisir et de motivation.