Est-ce qu’un bambin de 3 ans est capable d’apprendre un instrument ? Oui, vous répondront les professeurs qui dispensent chaque semaine des cours spécifiquement conçus pour les tous.tes petit.e.s. Mais il leur faut des méthodes adaptées qui tiennent compte de leurs capacités cognitives (attention, compréhension, capacité de concentration) et psychomotrices (maintien du corps, tenue d’un instrument adapté à la taille, équilibre et souffle). Grâce aux méthodes Coloustrings et Suzuki, les très jeunes enfants ont maintenant la possibilité de s’initier à un instrument de manière ludique et adaptée.
Découvrez dans cet article ces deux méthodes aux approches distinctes.
La méthode Colourstrings, qu’on pourrait traduire par « cordes de couleur », permet aux enfants dès l’âge de 4 ans de commencer le violon. A l’EML, le professeur Charles Garnier enseigne grâce à cette méthode qu’il trouve parfaite pour aborder cet instrument réputé difficile. « Il n’y a pas de sens à faire démarrer un.e petit.e de 4 ans avec une approche classique de lecture de la musique. Avant d’apprendre à lire, un enfant chante, parle, joue avec sa voix. L’idée de Colourstrings, c’est de transposer cette logique à l’instrument et d’adapter le support aux tous.tes petit.e.s, qui ne savent pas encore lire, pour leur permettre de jouer », explique-t-il.
Colourstrings est inspiré des principes de la méthode d’initiation musicale finlandaise Kodaï, basée sur le travail de l’écoute à travers des mélodies et des chansons populaires. Le système d’écriture y est adapté avec des syllabes rythmiques, c’est-à-dire qu’en lieu et place des noires et des croches, concepts difficiles à appréhender pour les jeunes enfants, il utilise des syllabes - « ta », « titi », etc. - qui facilitent la compréhension. « C’est une approche holistique, une philosophie d’enseignement où l’on cherche à faire réaliser les choses à l’enfant de manière d’abord instinctive, avant de lui faire peu à peu conscientiser l’apprentissage. Au début, on ne voit qu’un trait pour la longueur de la note, et petit à petit, on arrive à l’écriture de la noire traditionnelle », explique Charles Garnier. Un cheminement qui permettra à l’enfant, au bout de 3 ou 4 ans, de comprendre et de jouer avec une portée tout à fait classique.
Contrairement à la méthode Suzuki basée sur l’apprentissage « par cœur », la méthode Kodaï utilise très tôt un support mais adapté au développement et à l’univers de l’enfant. Ainsi, le système d’écriture possède une présentation visuelle colorée. Les notions musicales sont en vert, rouge, bleu et jaune, chaque couleur représentant la voix, du plus grave au plus aigu, d’un personnage. Un ours, un monsieur, une dame, un oiseau… Et de là, tout est possible ! On est plongé au pays de la musique. « Pour l’enfant, c’est plus facile de s’y retrouver : si la partition est jaune, il sait qu’il va jouer la corde de l’oiseau, etc. Ce support visuel, où les concepts sont associés à des personnages et à des images, permet de développer des capacités de lecture de manière ludique, agréable et accessible pour les enfants », explique Charles Garnier. Et même sur l’instrument, des gommettes de couleur placées au bout de la touche du manche permettent d’aider à s’y retrouver. L’univers Colourstrings possède son propre langage où tout est imagé pour « parler » à l’enfant. Ainsi, les harmoniques deviennent des « notes magiques », la partie la plus éloignée du manche est la terre, le milieu, le niveau des oiseaux, et tout en haut se trouve le soleil.
Autre élément-clé de la méthode Colourstrings pour aborder l’instrument : le chant. Ainsi, les enfants apprennent d’abord les comptines et mélodies simples, simplifiant ensuite pour elles.eux le déchiffrage de la partition. « On part de ce que l’enfant chante. Puis progressivement, on va jouer la rythmique de la chanson sur une seule corde, puis sur l’instrument dans son entier ».
En plus d’apprendre mélodies et chansons lors du cours individuel, l’enfant pratique également des petits exercices et des activités adaptées pour développer le rythme et la technique instrumentale. « On anticipe toute la progression technique des enfants par des jeux, pour leur faire prendre conscience de ce qui arrive quand on déplace la main et selon où l’on pose les doigts », explique le professeur. Le cours collectif, lui, permet aux enfants d’apprendre à jouer en groupe grâce à des échanges musicaux sous forme de jeu.
« L’avantage de la méthode est qu’elle peut être adaptée à d’autres répertoires. Si au début l’enfant travaille surtout des musiques et comptines populaires, peu à peu, l’enseignant introduit des pièces de Bach, de Mozart, et peut également transposer le système d’écriture sur toutes les partitions. Cela permet aux enfants Colourstrings de jouer avec d’autres enfants qui auraient une partition traditionnelle », souligne Charles Garnier.
Un cours individuel et collectif
Un.e enfant inscrit.e en violon Colourstrings suivra deux cours : un cours individuel de 20 minutes et un cours collectif de 45 minutes (les deux ne se suivant pas nécessairement).
Contrairement à l’enseignement Suzuki, le cours collectif Colourstrings n’implique pas la présence du parent, ceci afin de favoriser l’autonomie de l’enfant. Pour le cours individuel, la présence du parent est encouragée pour lui permettre d’accompagner l’enfant pour refaire les exercices et reproduire les gestes à la maison.
Votre enfant va entrer en 1P (4 ans) et le violon l’intéresse ? Alors inscrivez-le.la au cours violon Colourstrings, l’approche globale qui permet aux tous petits d’apprendre cet instrument de manière joyeuse, ludique et adaptée, tout en découvrant les notions musicales.
Créée au milieu du 19e siècle par le Dr. Shini’ichi Suzuki, lui-même violoniste, la méthode Suzuki est une approche à la fois pédagogique et philosophique. Elle est fondée sur le respect de l’enfant en tant qu’individu et sur la conception que l’habileté n’est pas héritée, mais s’apprend et se développe. Dans cette optique, le talent inné n’existe pas, mais est le résultat de l’éducation intégrée et dispensée par l’environnement mis en place autour de l’enfant dès sa naissance. Suivant les préceptes de cette méthode, celui-ci devrait ainsi être immergé dans un environnement musical le plus tôt possible car ce sont dès ses premières années de vie qu’il.elle est le plus réceptif et peut acquérir facilement des connaissances et des compétences qui, avec le temps, grandiront et tendront vers l’excellence.
Dans la méthode Suzuki, l’apprentissage d’un instrument de musique suit ainsi la même logique que celui de la langue maternelle. Comme l’enfant apprend la parole en entendant parler autour de lui et par de nombreuses répétitions, on considère que l’écoute répétée des sons lui permettra peu à peu de les reconnaître et de les imiter. Les élèves écoutent donc quotidiennement les enregistrements du répertoire et apprennent à chanter les mélodies, afin de se les approprier et de mémoriser les notes et leur durée. Puis, ils.elles s’exercent à reproduire ce qu’ils connaissent avec leur instrument. Ainsi, contrairement à la méthode classique d’apprentissage d’un instrument, la méthode Suzuki ne se base pas sur l’utilisation de partitions de musique mais sur l’oralité et l’ouïe, les partitions arrivant dans un deuxième temps. En revanche, tout comme la méthode classique, elle demande du travail quotidien, de la constance et de la régularité pour ancrer l’apprentissage à long terme. L’habileté se développe en passant par de tous petits paliers, et est répétée maintes fois et renforcée positivement.
Les parents jouent un rôle essentiel et sont une des clés vers le succès de l’apprentissage de la musique dans la méthode Suzuki. Nul besoin qu’ils.elles soient eux-mêmes musicien.ne.s, mais ils doivent comprendre le processus et encourager leur enfant dans ses efforts, car celui.celle-ci est stimulé par les réactions enthousiastes de ses parents qui l’aident à persévérer. La méthode préconise d’enseigner dans un premier temps au parent les bases du jeu et de la posture et d’assister au cours de groupe, tout en laissant jouer de la musique quotidiennement à la maison pour que l’enfant s’imprègne de son environnement musical. En voyant son parent jouer de l’instrument, ou lors d’un cours de groupe, l’enfant développera ainsi de lui.elle-même la volonté d’apprendre à jouer également.
Ainsi, en choisissant cette méthode d’enseignement, le parent s’engage à assister à la fois au cours individuel mais aussi au cours collectif de son enfant. « En suivant les cours, le parent acquerra lui.elle-même les bases utiles pour aider et expliquer à l’enfant ce qu’il.elle doit faire pour atteindre l’objectif à réaliser à la maison, mais c’est aussi un super moment où parent et enfant s’amusent ensemble ! », explique Szu-Yu Chen, professeure de flûte traversière Suzuki à l’EML. L’enseignante conseille ainsi aux parents intéressés par la méthode Suzuki de choisir un instrument pour lequel ils-elles ont elles.eux-mêmes de l’attrait puisqu’ils.elles seront amené.e.s à l’apprendre aussi, d’une certaine manière, pour accompagner leur enfant.
La méthode Suzuki considère le travail individuel et collectif de l’instrument avec la même importance. L’enseignement groupé avec les autres élèves est considéré comme un vecteur de motivation pour l’enfant qui peut observer ses camarades, les imiter, jouer avec elles.eux et se rende compte, aussi, que tout le monde éprouve des difficultés. « Dans le cours collectif qui est composé en moyenne de quatre à cinq autres jeunes musicien.ne.s, de niveaux similaires ou mélangés, le.la professeur.e propose des jeux, de dialogue ou d’imitation, de travailler une pièce tous ensemble », explique Szu-Yu Chen. « Dans le cours de groupe, les participant.e.s se sentent petit à petit appartenir à une grande famille. Les élèves plus avancé.e.s interprètent des pièces plus complexes, et c’est l’occasion pour les plus jeunes de rêver et d’avoir envie de se surpasser pour y arriver à leur tour. Même lors des auditions, plusieurs morceaux se passent en groupe ! », indique l’enseignante.
A l’origine conçue pour l’apprentissage du violon, la méthode Suzuki est aujourd’hui accessible pour apprendre de nombreux instruments. A l’EML, elle est proposée aux enfants pour le violoncelle, la flûte traversière et le piano.
Selon l’instrument, l’âge auquel peut débuter l’apprentissage Suzuki varie. Tandis que le violoncelle peut déjà être commencé à l’âge de 3 ans et le piano à 4 ans, la professeure Szu-Yu Chen propose aux petit.e.s de s’initier dès 5 ans à la flûte traversière, pour des questions de posture et de gestion du souffle.
Vous aimeriez en savoir plus sur la méthode ? Découvrez ci-dessous l’expérience d’une maman qui a accompagné deux de ses trois enfants dans l’apprentissage du violoncelle Suzuki.
« C’est notre fille aînée, Aïna, qui, à l’âge de cinq ans, a exprimé en premier le désir de jouer d’un instrument. Elle a commencé le violon, et cela a donné envie à son frère et à sa sœur de faire également de la musique. Nous sommes donc allé.e.s aux portes ouvertes de l’EML, et notre fils Eloïs, âgé de 4 ans, a eu un coup de cœur pour le cours de violoncelle Suzuki de Gabrielle Martin. A ce moment-là, nous n’étions pas vraiment conscient.e.s qu’il s’agissait d’une méthode particulière pour les tous.tes petit.e.s. On n’est pas du tout une famille de musicien.ne à la base, on découvre tout avec nos enfants ! », plaisante Eliane Rodel.
En inscrivant son fils à la méthode Suzuki, cette maman de trois enfants s’engage alors à l’accompagner à son cours individuel et collectif, soit deux cours par semaine. Un investissement important qu’elle n’a pas vécu comme une contrainte. « Le fait qu’il y ait deux cours par semaine nous aidait à avoir un bon rythme car il n’y avait pas un trop grand espace de temps entre chaque cours. Et mes enfants se réjouissaient énormément d’aller au cours de groupe car il y avait l’atmosphère d’une petite classe », explique-t-elle. Ses enfants, car la petite dernière, Linnea, âgée alors de trois ans, accompagne sa maman et son frère durant les cours. « C’était incroyable, car même si elle ne savait pas jouer exactement, elle était capable de reproduire une chanson, du fait de l’avoir tellement écoutée. Elle avait intégré la musique par le fait d’être présente », explique Eliane Rodel.
La petite fille réclame bientôt de pouvoir aussi faire du violoncelle Suzuki. Un apprentissage rendu possible pour une si jeune enfant, du fait d’un cours adapté à son âge et ses capacités. « Le dosage était progressif. Durant le cours individuel, l’enseignante passait par le jeu, puis l’écoute, demandait de se concentrer sur l’archet ou les doigts. Les activités varient énormément, ce qui aide à maintenir l’enfant concentré. C’était toujours adapté à son âge et à sa capacité à faire les choses », décrit la maman.
Ayant l’expérience de ses deux enfants plus jeunes, qui ont suivi la méthode Suzuki, et de sa fille aînée, qui a suivi un apprentissage classique du violon, la maman décrit les différences qu’elle a remarqué chez ses enfants dans leur rapport à la musique. « Avec la méthode Suzuki, l’apprentissage semblait plus naturel. L’instrument est devenu un compagnon, on baignait dans la musique et celle-ci a pris une grande importance dans la vie de nos enfants », détaille Eliane Rodel. « Aïna de son côté suivait son cours, travaillait à la maison, et de temps en temps, avait une audition, mais elle ne connaissait pas très bien les autres enfants de sa classe. L’apprentissage était beaucoup plus solitaire », compare-t-elle.
Aujourd’hui, la petite dernière, Linnea, âgée de 8 ans, suit toujours la méthode Suzuki, tandis que son frère Eloïs, 10 ans, est passé en structure musique-école au conservatoire. Est-ce grâce à la méthode Suzuki que le violoncelle est devenu pour lui une telle passion ? « C’est sûr que c’est grâce à cette méthode, car il était vraiment plongé dans la musique, avec de nombreuses propositions de concerts et de stages, en dehors des cours. Cela a vraiment beaucoup motivé mes deux enfants », analyse Eliane Rodel.
Vous vous demandez si un cours Suzuki conviendrait à votre enfant… et à vous ? Voici à quoi Eliane Rodel rend attentifs les parents intéressé.e.s.
« La présence du parent est très importante, donc il faut du temps à disposition, ce qui n’est pas toujours facile avec nos emplois du temps chargés. Mais cela augmente le plaisir et la vitesse d’apprentissage quand le parent est présent. Gabrielle Martin disait que cela motivait l’enfant parce qu’on lui donne du temps et de l’attention. Il ne faut pas le voir comme une perte de temps. Personnellement, j’ai passé beaucoup de bons moments avec mes enfants. Pour moi, c’était un peu un moment de méditation de la semaine et cela m’a permis de rencontrer d’autres parents. On avait vraiment le sentiment d’être dans une classe, comme une petite famille. »
Retrouvez les cours et les professeurs Suzuki ici, ou à l’occasion des portes ouvertes de l’EML (du 23 mars 2024).